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Les livres d'Eve
10 juillet 2014

"Je viens de Russie" de Zakhar PRILEPINE

Ce jour je vous parle d'un livre offert par Masse Critique et les Editions de la différence".

dans mon édition le sous-titre est "chroniques" et non "confessions"

 

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Résumé

 

          Je remercie vivement Babelio Masse critique et les « éditions de la différence » pour m’avoir permis de découvrir ce livre et son auteur.  Ce livre est très curieux, inclassable puisqu’il ne s’agit pas d’un roman mais de chroniques. Chaque chapitre est une réflexion sur un thème particulier et il va évoquer successivement ce qu’il pense de la Russie, de l’ex URSS, de ses dirigeants ceux de l’époque communiste, la transition avec Gorbatchev, Eltsine, et bien sûr de Poutine et Medvedev, de la vie de  tous les jours, l’actuelle et celle d’avant.

          Il évoque aussi la liberté d’expression, en comparant les différentes époques, les conditions dans lesquelles il est obligé de travailler en tant que journaliste.

          Il nous parle de son amour pour la littérature, en énumérant les auteurs qu’il aime et pourquoi il les aime, la musique, les arts en général, et nous décrit le « peuple russe » qu’il aime comme on aime sa mère avec de la tendresse et de la colère, car il n’insurge contre ceux qui ne bougent pas….

 

 

Ce que j’en pense :

 

          C’est un livre difficile à définir. Je m’attendais à un roman, et ce sont des chroniques. L’auteur qui est journaliste écrivain nous parle de son amour de sa terre qu’il considère pratiquement comme sacrée.

          Le livre se compose de deux parties. La première partie s’appelle « je viens de Russie (comme le titre du livre) et s’étend de 1999 à 2008.

           Il y évoque son amour pour son pays et nous décrit ce pays sous toutes ses formes : sa culture, sa façon de vivre, ses  politiciens, ses conditions de vie les comparant avec l’Occident ….

          On voit très vite son rejet du libéralisme. Il pense qu’avant sous l’ère soviétique les gens étaient plus solidaires, partageaient plus, se nourrissaient de peu,  il n’y avait pas de tentations possibles, les Russes,  ignorant qu’il pouvait exister autre chose, ne pouvaient pas se sentir frustrés…

          Il fait une belle description de la beauté en citant Dostoïevski. On note une nostalgie des grands écrivains du XIXe, à l’époque des Tsars. Il est fascinant quand il nous parle de culture et d’arts.

          Quand il parle des dirigeants, il n’est pas tendre…  il ne porte pas beaucoup Gorbatchev dans son cœur et nous parle de son surnom : « Gorbatch » qui pour lui sonne dur et évoque un caractère rigide alors qu’en fait dans l’esprit des gens cela se rapproche de « Gorgoucha » qui est un poisson de la famille des salmonidés et qui fait référence à sa fameuse tache.

          On a le même scénario avec Poutine mot qui signifie en russe « lumbago »  et se rapproche de « paoutina » qui veut dire toile d’araignée. On voit tout de suite comment il considère ces deux présidents, et le chapitre consacré à son entrevue avec Poutine qui reçoit des écrivains dans son bureau est surprenant car il analyse le comportement du personnage : charmeur et inquiétant, obsessionnel car il note absolument tout et biffe les réponses

          On note également un excellent chapitre dans lequel il compare Cervantès et le Ché qu’il considère comme le « jumeau métaphysique » de Cervantés et il compare de façon truculente leurs deux destins.

          Il aborde aussi un autre thème : la superstition et de la suspicion chez les Russes, et insiste sur le fait que les gens cherchent ce qui se cache derrière les phrases des écrivains, cherchant entre les lignes. On sent ce que ces gens peuvent endurer car ils sont sans arrêt sous surveillance et ne doivent se contrôler en permanence, se censurer car on ne sait jamais vraiment qui est son voisin. Et il évoque également le harcèlement (à grande échelle)par le pouvoir dont il est, lui-aussi souvent victime.

          Il consacre un chapitre à l’ambivalence de l’âme russe en faisant un parallèle entre la fin du tsarisme et l’époque actuelle qui est époustouflant, comme si c’était une nation qui n’arrive pas à naître et accouche dans la souffrance d’un fœtus mort.

          On sent son attachement profond au monde paysan qui est le monde vrai alors que les villes sont superficielles, sans profondeur.

          Dans la deuxième partie, il parle de lui, de sas conditions de travail, de son grand-père, héros de la guerre, de la difficulté pour trouver un emploi, des tracasseries administratives, des conditions dans lesquelles il exerce son travail de journaliste car son journal est considéré comme subversif, ce qu’il pense de l’école dans son pays..

          C’est un livre difficile à lire (il m’a fallu presque 30 jours car je rends ma critique au dernier moment. On ne sait pas bien s’il regrette l’URSS car les Russes étaient « lobotomisés », donc c’était bien agréable d’obéir, d’être docile car on était nourri ; il donne l’impression d’être dans l’utopie à la recherche d’un monde meilleur. Personne ne trouve grâce à ses yeux, le chapitre qu’il consacre à Sakharov est stupéfiant qui, pour lui, est un dissident donc un traître à sa patrie alors qu’il se comporte lui-même comme un dissident mais qui ne quitte pas son pays et fait de la résistance sur place.

          Il en est de même d’ailleurs vis-à-vis de Gorbatchev et Eltsine (là, je comprends mieux !) qui nous paraissent à nous, Occidentaux, ceux qui ont permis la libération du joug communiste et l’ouverture vers l’Europe et le reste du monde.

       Je pense que j’es saierai de lire un roman p our mieux comprendre cet écrivain : « San’kia », par exemple ou son recueil de nouvelles : « des chaussures pleines de Vodka chaudes » comme me l’a gentiment suggéré Nadejda qui le connait mieux que moi.

          J’ai besoin de lire un bon roman pour m  remettre. La note que je lui attribue est en lien avec le travail sérieux qu’il a effectué et des interrogations qu’il a soulevées en moi.     

   

            Note : 6,5/10

 

 

L’auteur :

 

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Né le 7 juillet 1975, dans le village de Ilinka,  Zakhar Prilepine (en cyrillique : Захар Прилепин)  a combattu en Tchétchénie entre 1996 et 1999 avant de s’engager dans les forces spéciales et d’exercer plusieurs métiers.

Membre du parti national-bolchévique de Limonov depuis 1996, il est l’un des intellectuels contestataires les plus célèbres de Russie. Il est marié et a trois enfants.

Il s’est fait connaître du grand public en 2004 avec son roman « Patologii » relatant sa guerre en Tchétchénie.

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Beaucoup le considèrent en Russie comme le Maxime GORKI de notre temps. A 38 ans, il a écrit une dizaine de romans traduits dans plusieurs langues.

 

« San’kia », fiction sur le terrorisme, paru en 2006, lui a valu la célébrité et a fait de lui un gourou de la jeunesse.

 « Je viens de Russie » rassemble des textes écrits entre 2003 et 2011. Ils forment un condensé spontané de ses émotions, de ses colères et de ses intuitions.

 

 

 

 

Extraits :

          Le bonheur est une illusion d’optique. Le rêve est le point situé à l’intersection de nos désirs et de nos possibilités. Et, nous pouvons définir nous-mêmes ce point de rencontre, c’est notre droit. Il est possible d’organiser la rencontre de nos désirs et de nos possibilités tous les jours, et, chaque fois se réjouir que tout ait réussi une fois de plus. P 16

 

          Quand le grand Fedor Mikhaïlovitch (Dostoïevski) affirmait que cette même beauté sauverait le monde, ce n’était pas aux belles personnes ni aux beaux paysages qu’il pensait.

          Il parlait de la beauté d’un acte, de celle de la virilité et de la féminité, de la beauté à la fois limpide et honnête. P 25

 

          Courage et patience, pitié et colère sont les quatre points cardinaux du Russe. P33

 

          « Rappelez-vous son visage (Gorbatchev), fermez les yeux et vous verrez un poisson avec une grosse tête, au regard calme, lent, et qui agite la queue avec mollesse, indifférent au fait que sa famille, ses voisins, ses enfants soient en train de se faire dévorer. Mais sa léthargie est trompeuse : il se libérera avec aisance de l’hameçon, du filet, et reviendra plus tard, toujours aussi calme, ouvrant la bouche d’où s’échappent des bulles insensées. P 38

 

          En fait, j’ai régulièrement l’impression de vivre dans le plus ignominieux des pays d’Afrique. Je ne fais pourtant rien de mal. Je n’enfreins pas la loi, je paie mes impôts, j’élève mes enfants, j’écris des lires. J’ai sur la Russie une opinion différente de celle des hommes au pouvoir mais jamais je n’ai appelé à les renverser par la violence. P 90

 

          L’histoire russe est aussi ambivalente que le caractère russe. La Grande Russie est en même temps la Russie minable. A l’époque des plus grandes libertés, partout naissent des troupeaux d’esclaves et les hommes les plus connus du pays, ces derniers temps, sont des esclaves absolus. Pendant les périodes d’oppression, des gens étonnamment libres se manifestent et ce sont eux, leurs paroles et leurs gestes, qui finalement définissent leur temps. P 102

 

          Vous savez, au sens le plus matériel, honteux, petit-bourgeois, je n’ai rien perdu quand l’union rouge est partie, quand mon empire s’est fissuré er effondré dans un nuage de poussière… je n’ai rien à regretter : nous vivions comme les autres, sans grandes vexations, sans tristesse coupable, sans espoir douloureux. Le pays était un fait établi, on ne nous avait pas appris à en prendre soin. De fait, l’Union Soviétique a élevé une génération de gens étonnamment infantiles. P 172

 

          S’agissant d’ambition, les choses sont simples : pas mal de gens, en particulier dans leur jeunesse, ne supportent pas l’idée de ne pas être supérieurs aux autres et de ne pas avoir de talent particulier. Au lieu de chercher à surmonter au quotidien leurs limites « naturelles », ils accusent le monde entier de ne pas les estimer à leur juste valeur. Du coup, ils haïssent le monde. C’est, je crois, le cas des grands dictateurs comme Léninie, Hitler et Staline. P 193

 

Lu en juillet  2014

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Commentaires
P
J'aime les citations mais je n'ai jamais réussi à lire un livre écrit par un russe. Trop compliqué pour moi !
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